LE FACE À FACE HERVÉ MARTIN
par Maurice Regnaut
S’opposer est d’ordinaire irrécusablement séparation, chez Hervé Martin jamais, s’opposer en lui et pour lui, dirait-il lui-même, est interpellation, est en lui et pour lui ce qui, dira-t-on ici, est un nécessaire, est un irrécusable face à face. Hervé Martin parlant du Livre des fusillés, c’est en lui et pour lui parler d’un Livre en effet « qui rappelle / la fulgurance stoppée » et c’est parler aussi d’un Livre où du même souffle un poème attendait, « glané au chant des adieux / gagné au champ intérieur / Sublime », un Livre où, insiste Hervé Martin, comment serait-il possible alors de ne pas faire face « à l’angle / de la rue / sur la place / du village / au porche / de la maison commune », Hervé Martin conclut alors que « La stature / leurs ombres / nous dominent nous / interpellent » : ainsi donc s’accomplit pleinement le total face à face intime, ainsi l’interpellation se révèle enfin l’état de parfait face à face, enfin, tel qu’on l’a défini chez Hervé Martin, l’état d’union parfaite avec soi-même en tant qu’union parfaite entre ce qui a eu lieu déjà et ce qui aura lieu, en dépit des « élagueurs de mémoire », en tant que présence en tout de ce qui est possible et de ce qui ne l’est pas. Tout livre, en son parfait sens de face à face assumé pleinement, tout livre, en définitive, Hervé Martin le reconnaîtrait sans doute, avec sa belle sincérité, tout livre en fait n’est que toujours face à face ensemble avec soi, avec tous, avec tout.
maurice