Fragile et Claire
Emmanuel Hiriart
Éditions Henry – Collection La main aux poètes
ISBN 978-2-36469-169-8
Octobre 2017
98 pages
12 €
On aurait souhaité qu’Emmanuel Hiriart nous livre un beau livre pour d’autres raisons que celle qui a fait naître Fragile et Claire qui paraît aux éditions Henry. Ce long poème est un tombeau poétique pour une très proche amie qui fut chère au poète. Il évoque Claire dans la difficulté de vivre. De son évocation vive jusqu’au recueillement face à la tombe, Emmanuel Hiriart retrace des épisodes de son existence en d’émouvants poèmes teintés d’affection.
En dédiant aussi son livre « A tous ceux que j’aime » le poète dit son attachement fort aux proches et amis qui l’entourent.
Il rappelle par bribes de souvenirs la vie de Claire à chaque page. Est-elle sœur, cousine, amie celle qui manque désormais et qui est décrite comme une confidente complice au poète ?
Tu es ma sœur de délire et de sang, et l’angoisse nous est commune.
Hiriart évoque avec tendresse et affliction les parcelles de temps d’une vie qui fut brève. Blessée dans son corps par une maladie semble-t-il dévorante, elle n’a pas laissé le choix au hasard pour décider de l’avenir de ses jours auxquels elle a mis fin. Il y a dans le titre par l’élision du et cet EtClaire qui fait référence tant à la brièveté du temps qu’à l’éclat qu’il partage. On songe alors à une étoile qui filerait trop vite.
Ce long poème est comme un monologue impérieux adressé à l’absente. On regrette parfois les mots qu’on n’a pas dits à temps. Le livre la ressuscite le temps de sa lecture en rappelant à la mémoire du jour les traces laissées aux souvenirs du cœur. Celle dépeinte comme une aventurière de la nature, à la vie singulière est aussi une poète comme l’auteur.
Où l’on ne va pas / T’aimais/ Aller:/ Dormir dans le lit / Du torrent / Rejoindre la montagne/
Emmanuel Hiriart égrène dans les poèmes, partages, souvenirs communs et les complicités.
Tu aimais ton jardin/ Son palmier pansu comme un fruit/...
Souvent tu choisissais l’action. Tu t’y lançais alors sans retenue, avec une efficacité digne des rouages les mieux huilés de l’horloge sociale. .../
Comme pour mieux la retenir encore un peu près de lui, au bord de la tombe il écrit :
Tu auras des fleurs aussi : il faut donner un peu de chair au poème si l’on veut vivre encore
Le poème ici est parfois une invocation qui aurait le pouvoir - peut-être ? - de sauver Claire encore du chemin où elle s’est engagée.
Je t’écris, ce soir/ Pour gravier sous l’aubier/ De ton silence quelques noms/ Dans l’espoir de voir/ par eux l’imprévisible souffle/ Ranimer en ta nuit désarçonnée/ L’étoile familière/ Où tu savais vivre
Puis Emmanuel Hiriart poursuit et va de son pas d’écriture jusqu’à l’ultime du possible avec ce sentiment d’abandon de ceux qui s’éloignant de la tombe après l’inhumation rejoignent déjà l’absent (e) au feu de la mémoire commune.
Je ne veux pas t’abandonner / A la mort Ni prendre / En elle ma demeure
hm