Cicatrice de l’Avant-jour
Lydia Padellec
Éditions Al Manar
ISBN : 978-2-364262232
78 pages
17 €
Cicatrice de l’Avant-jour est né du vif bouleversement qu’auront provoqué les tragiques et meurtriers attentats du 13 novembre 2015 dans le for intérieur de l’auteure.
Composé de cinq ensembles aux titres marqués par les mots nuit, cicatrice, brûlure ou cendre au versant inquiétant du sens qu’ils évoquent, le livre rassemble une cinquantaine de poèmes. Écrits sous l’émotion et laissés ici tels des stigmates creusés aux plis du corps, ils sont désormais indélébiles. De très belles gravures de Marie Alloy accompagnent les ensembles comme en un hommage vif, coloré pour certains du rouge d’une émotion douloureuse.
Le livre me semble marqué par une gravité singulière et intime qui s’ajoute à celle impensable des événements meurtriers. Elle focalise chez la poète les inquiétudes et les angoisses qu’auront réveillées la violence et l’horreur dans le surgissement imprévisible de la mort.
Tu graves sur la pierre /l’empreinte de l’insecte / tes peurs d’enfants / prises dans la toile / te hantent encore /…
L’ouvrage est parsemé de nombreuses citations et dédicaces, comme si la poète avait souhaité rassembler l’amitié autour d’elle et rappeler les valeurs essentielles qui guident son existence.
De l’enfance qui s’éloigne dans la proximité d’une grand-mère qui fut aimée et essentielle pour Lydia Padellec, jusqu’à la limite de la mort qui se profile au lointain dans le dernier ensemble, la poète traverse les strates de l’angoisse et cette conscience vive de vivre.
Entre parenthèses / Notre vie s’écoule / Trace des silences / Comme des cercles / dans la cendre.
Au cœur de sa réflexion elle s’interroge sur le désir profond qui conduit sa vie,
Que cherches-tu / à travers cette nuit étale
Puis inventorie dans la succession des poèmes les rives de la nuit peuplées parfois des monstres noirs de l’enfance.
.../ la nuit cogne /contre les meubles / tu ne l’entends pas / contre toi elle se glisse / dans les draps froids/…
Un univers onirique se développe alors dans les poèmes témoins de ces moments tourmentés et une mélancolie s’installe qui annexera l’humeur des jours qui suivront ce drame.
La mer écartelée geint / d’une rumeur noire - /
Il transparaît dans les pages que ces événements furent un véritable choc pour Lydia Padellec. Face à l’horreur, ces attentats entraînent la poète dans une traversée de la solitude. Une inquiétude vive naît aussi pour les proches et l’aimé.
Où es-tu mon amour/ la musique s’est tue/ étouffée par les griffes/ de la bête immonde/…
Le mot amour dans les poèmes de l’ensemble Nuit de sang est repris comme un leitmotiv dans un ressassement qui exprime une angoisse grandissante et la crainte de sa mort.
Avec cette horrible tragédie délimitant les frontières funestes et les valeurs de la vie, quelque chose de grave a surgi qui a changé le monde et l’existence même de la poète, à jamais dans sa chair.
L’hirondelle est partie / Et ne reviendra pas / Son chant s’est éteint / Et l’innocence perdue / Je regarde derrière moi / Le chemin s’est brisé
hm